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LES ARTISTES LITTÉRAIRES.

même à ce labeur stérile, affolé comme la boussole que sollicitent en même temps des aimants opposés.

Notons que la France, depuis un siècle, a, par treize fois, changé sa forme gouvernementale, et cela sans qu’on puisse savoir encore si son dernier avatar réalise mieux que les autres ses desiderata suprêmes. La quantité des religions, importées ou inventées dans les cent ans qui auront suivi la Révolution, dépasse tout ce qu’on pourrait rêver du peuple le plus théologien du monde ; et, de tous ces cultes, il n’en est pas un qui, jusqu’à présent, en dehors du cercle de ses adeptes, ait pu passer pour autre chose qu’une manifestation plus ou moins curieuse de la pensée philosophique. Quant à la littérature et aux arts, ils ont engendré des écoles qu’il est inutile d’essayer de compter ; ils ont produit d’innombrables personnalités de natures diverses, dont quelques-unes apportaient dans leur œuvre des facultés géniales : presque toutes ont eu le temps de naître, de vivre et de disparaître en quelques années ; presque toutes ont passé, avant même que la génération d’où elles étaient sorties fût rentrée dans la tombe.

On devine ce que peut devenir la pensée humaine au milieu de ce chaos. Si l’homme, — comme le maître des Fleurs du Mal, — est artiste et poète, s’il a reçu du ciel un don de sensibilité qui en fait