Page:Stendhal - Chroniques italiennes, II, 1929, éd. Martineau.djvu/169

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La pauvre abbesse, soupirant profondément, était tellement troublée qu’elle ne savait pas même répondre. Elle n’avait plus Félize auprès d’elle ; celle-ci s’était éloignée prudemment, après l’avoir conduite jusqu’auprès des deux malheureuses religieuses dont elle craignait par dessus tout d’être reconnue.

« Mes filles, faites tout ce qui vous semble nécessaire, tout ce qui vous paraîtra convenable », dit enfin la malheureuse abbesse d’une voix éteinte par l’horreur de la situation où elle se trouvait. « Je saurai dissimuler toutes nos hontes, mais rappelez-vous que les yeux de la divine justice sont toujours ouverts sur nos péchés. »

Céliane ne fit aucune attention aux paroles de l’abbesse.

« Sachez garder le silence, madame, c’est là tout ce que l’on vous demande », lui répéta-t-elle plusieurs fois en l’interrompant. S’adressant ensuite à Martona, la confidente de l’abbesse, qui venait d’arriver auprès d’elle :

« Aidez-moi, ma chère amie ! Il y va de l’honneur de tout le couvent, il y va de l’honneur et de la vie de l’abbesse ; car si elle parle, elle ne nous perd pas à demi, mais aussi nos nobles familles ne nous laisseront pas périr sans vengeance. »