Page:Stendhal - Chroniques italiennes, II, 1929, éd. Martineau.djvu/214

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Pour éviter cet accident qui eût été terrible pour son amour, il faisait une cour assidue à la princesse. C’était une femme un peu forte (il est vrai qu’elle avait trente-quatre ans), mais son caractère, toujours passionné pour quelque chose, toujours enjoué, lui donnait l’air jeune. Ce caractère servait les projets de Gennarino qui, à tout prix, voulait se corriger de cet air hautain et dédaigneux qui déplaisait à Rosalinde.

Gennarino ne lui avait pas adressé trois fois la parole, mais aucun des sentiments de Rosalinde n’était un mystère pour lui : lorsqu’il cherchait à prendre les manières gaies, ouvertes, et même un peu étourdies, des jeunes seigneurs de la cour de France, il voyait un air de contentement dans les yeux de Rosalinde. Une fois même, il avait surpris un sourire et un geste expressif, comme il achevait de raconter devant la reine une anecdote, assez triste au fond, mais dont il avait expliqué les circonstances avec l’air tout désintéressé et nullement tragique qu’y eût mis un Français.

La reine, qui avait le même âge que Rosalinde, c’est-à-dire vingt ans, ne put s’empêcher de faire compliment à Gennarino sur l’absence de l’air tragique et espagnol qu’elle était charmée de ne pas avoir trouvé dans son récit. Gennarino regarda