Page:Stendhal - Chroniques italiennes, Lévy, 1855.djvu/225

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sa profonde science et la sagacité si supérieure de son esprit, n’eût été vaincu par la beauté de Béatrix et ne la ménageât dans les interrogatoires. Il suivit de là que Sa Sainteté lui ôta la direction de ce procès et la donna à un autre juge plus sévère. En effet, ce barbare eut le courage de tourmenter sans pitié un si beau corps ad toturam capillorum (c’est-à-dire qu’on donna la question à Béatrix Cenci en la suspendant par les cheveux).

Pendant qu’elle était attachée à la corde, ce nouveau juge fit paraître devant Béatrix sa belle-mère et ses frères. Aussitôt que Giacomo et la signora Lucrèce la virent :

— Le péché est commis, lui crièrent-ils ; il faut faire aussi la pénitence, et ne pas se laisser déchirer le corps par une vaine obstination.

— Donc vous voulez couvrir de honte notre maison, répondit la jeune fille, et mourir avec ignominie ? Vous êtes dans une grande erreur ; mais, puisque vous le voulez, qu’il en soit ainsi.

Et, s’étant tournée vers les sbires :

— Détachez-moi, leur dit-elle, et qu’on me lise l’interrogatoire de ma mère, j’approuverai ce qui doit être approuvé, et je nierai ce qui doit être nié.