Page:Stendhal - De l’amour, II, 1927, éd. Martineau.djvu/141

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cence. Les Allemands songent bien moins que nous à ce qui rompt la société, et l’indécence n’est presque qu’un mal de convention. Il y a cinq ans que M. de Bulow fait ainsi la cour à Mina qu’il n’a pas pu épouser à cause de la guerre. Toutes les demoiselles de la société ont leur amant connu de tout le monde, mais aussi parmi les Allemands de la connaissance de mon ami, M. de Mermann, il n’en est pas un seul qui ne se soit marié par amour ; savoir :

« Mermann, son frère George, M. de Voigt, M. de Lasing, etc., etc. Il vient de m’en nommer une douzaine.

« La manière ouverte et passionnée dont tous ces amants font la cour à leurs maîtresses serait le comble de l’indécence, du ridicule et de la malhonnêteté en France.

« Mermann me disait ce soir en revenant du Chasseur vert, que, de toutes les femmes de sa famille très nombreuse, il ne croyait pas qu’il y en eût une seule qui eût trompé son mari. Mettons qu’il se trompe de moitié, c’est encore un pays singulier.

« Sa proposition scabreuse à sa belle-sœur, madame de Munichow, dont la famille va s’éteindre faute d’héritiers mâles, et les biens très considérables retourner au prince, reçue avec froideur, mais « ne m’en reparlez jamais. »