Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, I, 1927, éd. Martineau.djvu/216

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

arrangement n’est une friponnerie envers personne, voilà l’essentiel, ce me semble. Le prince, de la faveur duquel nous faisons métier et marchandise, n’a mis qu’une condition à son consentement, c’est que la future duchesse fût née noble. L’an passé, ma place, tout calculé, m’a valu cent sept mille francs ; mon revenu a dû être au total de cent vingt-deux mille ; j’en ai placé vingt mille à Lyon. Eh bien ! choisissez : 1° une grande existence basée sur cent vingt-deux mille francs à dépenser, qui, à Parme, font au moins comme quatre cent mille à Milan ; mais avec ce mariage qui vous donne le nom d’un homme passable et que vous ne verrez jamais qu’à l’autel ; 2° ou bien la petite vie bourgeoise avec quinze mille francs à Florence ou à Naples, car je suis de votre avis, on vous a trop admirée à Milan l’envie nous y persécuterait, et peut-être parviendrait-elle à nous donner de l’humeur. La grande existence à Parme aura, je l’espère, quelques nuances de nouveauté, même à vos yeux qui ont vu la cour du prince Eugène ; il serait sage de la connaître avant de s’en fermer la porte. Ne croyez pas que je cherche à influencer votre opinion. Quant à moi, mon choix est bien arrêté : j’aime mieux vivre dans un quatrième étage avec vous