Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, I, 1927, éd. Martineau.djvu/398

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faisait surtout le triomphe de la marquise Raversi, c’est qu’il était impossible de trouver des témoins de visu de ce fatal combat. Le valet de chambre qui le premier en avait apporté la nouvelle à Parme était à l’auberge du village Sanguigna lorsqu’il avait eu lieu ; la petite Manetta et la vieille femme qui lui servait de mère avaient disparu, et la marquise avait acheté le vetturino qui conduisait la voiture et qui faisait maintenant une déposition abominable. « Quoique la procédure soit environnée du plus profond mystère, écrivait le bon archevêque avec son style ciceronien, et dirigée par le fiscal général Rassi, dont la seule charité chrétienne peut m’empêcher de dire du mal, mais qui a fait sa fortune en s’acharnant après les malheureux accusés comme le chien de chasse après le lièvre ; quoique le Rassi, dis-je, dont votre imagination ne saurait s’exagérer la turpitude et la vénalité, ait été chargé de la direction du procès par un prince irrité, j’ai pu lire les trois dépositions du vetturino. Par un insigne bonheur, ce malheureux se contredit. Et j’ajouterai, parce que je parle à mon vicaire général, à celui qui, après moi, doit avoir la direction de ce diocèse, que j’ai mandé le curé de la paroisse qu’habite ce pécheur égaré. Je vous