Page:Stendhal - La chartreuse de Parme (Tome 2), 1883.djvu/91

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coup le Rassi se secoua et s’écria avec une aisance parfaite et de l’air de Figaro pris en flagrant délit par Almaviva :

— Ma foi, monsieur le comte, je n’irai point par quatre chemins avec votre excellence : que me donnerez-vous pour répondre à toutes vos questions comme je ferais à celles de mon confesseur ?

— La croix de Saint-Paul (c’est l’ordre de Parme), ou de l’argent, si vous pouvez me fournir un prétexte pour vous en accorder.

— J’aime mieux la croix de Saint-Paul, parce qu’elle m’anoblit.

— Comment, cher fiscal, vous faites encore quelque cas de notre pauvre noblesse ?

— Si j’étais né noble, répondit le Rassi avec toute l’impudence de son métier, les parents des gens que j’ai fait pendre me haïraient, mais ils ne me mépriseraient pas.

— Eh bien, je vous sauverai du mépris, dit le comte, guérissez-moi de mon ignorance. Que comptez-vous faire de Fabrice ?

— Ma foi, le prince est fort embarrassé : il craint que, séduit par les beaux yeux d’Armide, pardonnez à ce langage un peu vif, ce sont les termes précis du souverain ; il craint que, séduit par de fort beaux yeux qui l’ont un peu touché lui-même, vous ne le plantiez là, et il n’y a que vous pour les affaires de Lombardie. Je vous dirai même, ajouta Rassi en baissant la voix, qu’il y a