Page:Stendhal - Lamiel, éd. Stryienski, 1889.djvu/252

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Lamiel avait distingué un jeune homme fort laid et qui avait l’air timide, elle lui adressa la parole avec grâce ; à peine put-il répondre ; il devint fort rouge. En quelques minutes, Lamiel s’en fit un protecteur. Il lui conseilla à mi-voix de demander du thé à la maîtresse du logis et de la prier de lui faire compagnie.

— Vous lâcherez vos trente-cinq sous, lui dit-il, et à ce prix vous aurez sa protection pour la nuit.

Lamiel suivit ce conseil, et invita à prendre du thé le jeune homme timide, qui se trouva être un apothicaire.

— N’est-ce pas, dit-il à la maîtresse du logis, après avoir vanté son thé, que mademoiselle est trop jolie pour voyager seule ? Ses yeux ont trop d’esprit, il lui faudrait prendre l’air stupide ; mais comme une pareille métamorphose lui est impossible, je vais lui donner une recette.

Le mot métamorphose, prononcé avec emphase, avait fait la conquête de la maîtresse du logis. L’apothicaire continua avec une emphase croissante :

— Les pharmaciens font piler les feuilles de houx, vous savez, mesdames, ces feuilles qui ont des piquants au bord et qui sont d’un si beau vert ?