Page:Stendhal - Lamiel, éd. Stryienski, 1889.djvu/313

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petit-fils du chapelier Boucaud ? Si l’on parlait de Boucaud devant lui, il rougissait, de là cette physionomie immobile ; il fallait bien cacher cette inquiétude qui venait l’agiter à chaque instant, de là cette habileté suprême au pistolet.

La maîtresse qui lui eût convenu, qui eût fait la tranquillité et bientôt le bonheur de sa vie, eût été une femme de haute naissance qui lui eût répété dix fois par jour :

— Oui, mon noble Ephraïm, vous êtes un comte véritable, vous avez tout d’un homme de haute naissance, même les petites fautes de prononciation. On disait piqueu à Versailles, et vous dites piqueu. Vous avez même les petits ridicules des contemporains de M. de Talleyrand.

Le comte de Nerwinde eût dû être l’aide de camp du prince, dont les droits ne sont pas bien reconnus certains. L’étiquette était son fort, l’élément de son bonheur, et il était l’un des complices d’une société où l’on voulait s’ennoblir par l’orgie, par le scandale, par des propos singuliers, par la prétention de plaisanter sur tout et même sur les choses prétendues respectables. Quelle existence pour le petit-fils d’un chapelier !