Page:Stendhal - Lamiel, 1928, éd. Martineau.djvu/304

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les amis du comte de Nerwinde. Ces messieurs voyaient Lamiel s’enivrer avec tant de bonheur des plaisirs de la société, goûter avec tant de vivacité les parties de plaisir, qu’ils la croyaient la plus heureuse des femmes. Fidèles aux idées vulgaires et à la mode parmi eux qui faisaient du plaisir un des éléments nécessaires du bonheur, le parfait contentement ne pouvait se concilier avec lit à part. Ces messieurs prirent de l’espoir, firent des projets. Six semaines après l’imprudent aveu du comte, tous ses amis avaient tenté fortune auprès de Lamiel, et tous avaient été refusés avec modestie et sans aucune prétention à la vertu féminine :

— Un jour, peut-être, mais maintenant non !

Mais un soir, en descendant dans la forêt de Saint-Germain pour aller prendre le bateau à vapeur au port de Maisons, Lamiel vit les yeux de Gaillot humides de bonheur, et, dans ce moment, elle trouvait la gaieté de la société un peu affectée : on se chatouillait pour se faire rire ; il lui semblait que depuis un quart d’heure, on manquait d’esprit. Elle se décida en un instant.

— Quel est celui de tous ces messieurs qui a le plus d’esprit, votre amant excepté, bien entendu ? dit-elle à Gaillot.