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la campagne

sans se l’avouer, il était fort troublé, il écrivit ce plan.

Le lendemain matin au salon, madame de Rênal fut un instant seule avec lui :

— N’avez-vous point d’autre nom que Julien ? lui dit-elle.

À cette demande si flatteuse, notre héros ne sut que répondre. Cette circonstance n’était pas prévue dans son plan. Sans cette sottise de faire un plan, l’esprit vif de Julien l’eût bien servi, la surprise n’eût fait qu’ajouter à la vivacité de ses aperçus.

Il fut gauche et s’exagéra sa gaucherie. Madame de Rénal la lui pardonna bien vite. Elle y vit l’effet d’une candeur charmante. Et ce qui manquait précisément à ses yeux à cet homme, auquel on trouvait tant de génie, c’était l’air de la candeur.

— Ton petit précepteur m’inspire beaucoup de méfiance, lui disait quelquefois madame Derville. Je lui trouve l’air de penser toujours et de n’agir qu’avec politique. C’est un sournois.

Julien resta profondément humilié du malheur de n’avoir su que répondre à madame de Rênal.

Un homme comme moi se doit de réparer cet échec, et saisissant le moment où l’on passait d’une pièce à l’autre, il