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le rouge et le noir

fervent, nouvellement arrivé de Dijon, ne s’y trompait pas.

Mourir ainsi, mais non de ma main, ce n’est point un péché, pensait madame de Rênal. Dieu me pardonnera peut-être de me réjouir de ma mort. Elle n’osait ajouter : Et mourir de la main de Julien, c’est le comble des félicités.

À peine fut-elle débarrassée de la présence du chirurgien et de tous ses amis accourus en foule, qu’elle fit appeler Élisa, sa femme de chambre.

— Le geôlier, lui dit-elle en rougissant beaucoup, est un homme cruel. Sans doute il va le maltraiter, croyant en cela faire une chose agréable pour moi… Cette idée m’est insupportable. Ne pourriez-vous pas aller comme de vous-même remettre au geôlier ce petit paquet qui contient quelques louis ? Vous lui direz que la religion ne permet pas qu’il le maltraite… Il faut surtout qu’il n’aille pas parler de cet envoi d’argent.

C’est à la circonstance dont nous venons de parler que Julien dut l’humanité du geôlier de Verrières ; c’était toujours ce M. Noiroud, ministériel parfait, auquel nous avons vu la présence de M. Appert faire une si belle peur.

Un juge parut dans la prison. — J’ai donné la mort avec préméditation, lui dit