Page:Stendhal - Lucien Leuwen, I, 1929, éd. Martineau.djvu/221

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France jusqu’à ce qu’elle fût rétablie dans sa chose, c’est-à-dire aux Tuileries, etc., etc. Rien n’était dit par M. Du Poirier pour adoucir l’éclat de ces grandes vérités, ou pour ménager les préjugés de son adepte.

— Quoi ! dit tout à coup le docteur, vous, homme bien né, avec des mœurs élégantes, de la fortune, une jolie position dans le monde, une éducation délicate, vous vous jetez dans l’ignoble juste milieu ! Vous vous faites son soldat, vous ferez ses guerres, non pas la guerre véritable, dont même les misères ont tant de noblesse et de charmes pour les cœurs généreux, mais la guerre de maréchaussée, la guerre de tronçon de chou, contre de malheureux ouvriers mourant de faim : pour vous, l’expédition de la rue Transnonain[1] est la bataille de Marengo.....

— Mon cher chevalier, dit Lucien au docteur Bilars, qui se scandalisait et se croyait obligé de défendre le juste milieu ; mon cher chevalier, il me vient fantaisie de raconter au docteur quelques petits écarts de jeunesse qui sont tout à fait du ressort de la médecine et dont je vous ferai confidence, mais un autre jour ;

  1. Allusion aux mesures répressives des troubles qui éclatèrent sur divers points de Paris, notamment dans le quartier Saint-Martin, les 13 et 14 avril 1834. (Note de R. Colomb.)