Page:Stendhal - Lucien Leuwen, II, 1929, éd. Martineau.djvu/422

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Le ministre alla à son bureau, où il prit deux mille francs.

— Voici deux mille francs, faites bien les choses, allez jusqu’à trois mille francs au besoin, s’il le faut. Peut-on pour cela avoir quelque chose de présentable ?

— Je le crois.

— Eh bien ! il faudra faire remettre cette jolie montre de femme avec une chaîne d’or, et cela par une main sûre, et avec un volume des romans de Balzac portant un chiffre impair, 3, 1, 5, à madame Lavernaye, rue Sainte-Anne, n° 90. Actuellement que vous savez tout, mon ami, encore un acte de complaisance. Ne laissez pas les choses faites à demi, raccrochez-moi ces dix mille francs, et qu’il ne soit pas dit, ou du moins qu’on ne puisse pas prouver à qui de droit que j’ai fait, moi ou les miens, la moindre affaire sur cette dépêche.

— Votre Excellence ne doit avoir aucune inquiétude à ce sujet, cela vaut fait, dit Lucien en prenant congé avec tout le respect possible.

Il n’eut aucune peine à trouver M. Rouillon, qui dînait tranquillement à son troisième étage avec sa femme et ses enfants. Et moyennant l’assurance de payer la différence à la revente, le soir même, au café Tortoni, ce qui pouvait être un