Page:Stendhal - Mémoires d’un touriste, I, 1929, éd. Martineau.djvu/157

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jolies collines. Le paysage serait tout à fait digne d’admiration, s’il avait de grandes montagnes ou du moins des arbres séculaires ; mais, en revanche, il a la mer, dont la vue jette tant de sérieux dans l’âme ; la mer, par ses hasards, guérit le bourgeois des petites villes d’une bonne moitié de ses petitesses.

Après les cinq divisions du nord, la généreuse Alsace, Paris et son cercle égoïste de quatre-vingts lieues de diamètre, la Bretagne dévote et courageuse, et la Normandie civilisée, nous trouvons au midi la Provence et sa franchise un peu rude. Les partis politiques donnent des assassinats en ce pays : le maréchal Brune, les mameluks de Marseille en 1815, les massacres de Nîmes[1].

Nous arrivons à la grande division du Languedoc, que je compte de Beaucaire et du Rhône jusqu’à Perpignan. On a de l’esprit et de la délicatesse en ces contrées ; l’amour n’y est pas remplacé par Barême ; il y a même, vers les Pyrénées, une nuance de galanterie romanesque et d’inclination aux aventures qui annonce la noble Espagne.

  1. L’exemplaire Bucci ajoute ici ces mots : « et un parti y attend l’étranger. J’y ai entendu ce vers :
    O Rus ! Quando ego te aspiciam »
    N. D. L. É.