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pensées

Rodogune et Cinna[1] ont fait non seulement comprendre, mais sentir à Tencin des vérités dont il ne se serait jamais douté sans ces deux chefs-d’œuvre. Une comédie fera le même effet pour les vices du domaine de la comédie, mais elle n’en fera qu’en proportion que les personnages auront de bonnes têtes. Sans ça le vicieux qu’on voudrait corriger par l’exemple du protagoniste dira toujours : oh ! dans l’occasion j’aurai plus d’esprit que lui. Donc en donnant du génie à mes personnages je ferai comprendre des vérités, je les ferai sentir en proportion du degré d’émotion que je donnerai au spectateur.

C’est ici le domaine de la scenegiatura ou de l’art d’émouvoir par la disposition. Donnez le plus grand génie possible à tous vos personnages, la meilleure scenegiatura devient naturelle.

On admire les caractères de Rodogune. Ils feraient un bien plus grand effet si la scenegiatura était aussi bonne que possible.

  1. 17 thermidor XII [6 août 1804].