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pensées

est qu’une supposition, produite par la mémoire du passé. Nous concevons qu’une chose sera par la suite, parce que nous savons qu’il existe quelque chose à présent qui a le pouvoir de la produire. Or nous ne pouvons concevoir qu’une chose a le pouvoir d’en produire une autre par la suite que par le souvenir qu’elle a produit la même chose ci-devant. Ainsi toute conception[1] ou image de l’avenir est la conception ou image d’un pouvoir capable de produire quelque chose. Cela posé, quiconque attend un plaisir futur doit concevoir en lui-même un pouvoir à l’aide duquel ce plaisir peut être atteint. Et comme les passions dont je parlerai bientôt consistent dans la conception de l’avenir, c’est-à-dire dans la conception d’un pouvoir passé et d’un acte futur, je vais parler de ce pouvoir.

Par ce pouvoir j’entends les facultés du corps : nutritives, génératives, motrices ; ainsi que les facultés de l’esprit, la science ; et de plus les pouvoirs acquis par leurs moyens, tels que ; les richesses, le rang, l’autorité, l’amitié, la faveur, la bonne fortune (faveur du tout-puissant) (à mes yeux : (h. B.), faveur du cours inaperçu des choses).

  1. Hobbes, 78.