Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, II, 1927, éd. Martineau.djvu/101

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Je regrette l’ancienne tour du Louvre. L’architecture gallo-grecque qui l’a remplacée, n’est pas d’une assez sublime beauté pour parler à mon âme aussi haut que la vieille tour de Philippe-Auguste. (Je viens d’ajouter cette comparaison pour expliquer mon idée ; quand pour la première fois je me trouvai à Florence, je ne pensais à rien qu’à ce que je voyais, pas plus au Louvre qu’au Kamschatka.)

À Florence, le palazzo Vecchio et le contraste de cette réalité sévère du moyen âge, apparaissant au milieu des chefs-d’œuvre des arts et de l’insignifiance des Marchesini modernes, produit l’effet le plus grandiose et le plus vrai. On voit les chefs-d’œuvre des arts enfantés par l’énergie des passions, et plus tard tout devenir insignifiant, petit, contourné, quand la tempête des passions cesse d’enfler la voile qui doit faire marcher l’âme humaine, si impuissante quand elle est sans passions, c’est-à-dire sans vices ni vertus.

Ce soir, assis sur une chaise de paille, en avant du café, au milieu de la grande place et vis-à-vis le palazzo Vecchio, la foule et le froid, fort peu considérables l’un et l’autre, ne m’empêchaient point de voir tout ce qui s’était passé sur cette place. C’est là que vingt fois Florence