Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, III, 1927, éd. Martineau.djvu/61

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que n’a-t-il vingt ans de moins ! Il est encore fort agréable dans une petite salle. La bonté de Titus m’émeut jusqu’aux larmes. Quelle tragédie que la Clémence traduite par Racine ! Pour moi les modulations de Ronconi expriment encore mieux la bonté réunie à la puissance que l’harmonie des vers de Racine, particulièrement dans ce passage :

Questo o Romani è fabricarmi il tempio.

Quelques personnes sentiront que si ces paroles étaient chantées par une voix de basse, au lieu de l’être par une belle voix de tenore, elles perdraient ce qu’elles ont de céleste. Un poëte qui ferait très-bien les vers français, et qui ne pourrait inventer la tragédie, devrait s’emparer de ce sujet. Il aurait un grand succès ; car nous savons tous qu’Auguste était un vil coquin. On remplacerait le rôle d’Anio, fade en tragédie, par un Thraséas, un Corbulon, quelque vieux général à cheveux blancs, qui ne pourrait aimer Titus parce qu’il est empereur, mais qui rendrait justice à ses grandes actions. Il aurait assez de sens pour voir que la république est impossible, et s’en prendrait aux dieux du désir de liberté qui le dévore, sans que son esprit puisse trouver les moyens de