Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, III, 1927, éd. Martineau.djvu/89

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écrivain dramatique est de tenir ses personnages dans la direction de l’affaire et des intérêts qui les occupent. Aveuglé par sa haine pour un peuple voisin, chez lequel on voit les personnages abandonner leurs intérêts les plus pressants pour faire des descriptions morales ou poétiques des émotions qui les agitent, il oublie quelquefois que certaines passions sont déclamatoires dans la nature comme au théâtre, l’amour, par exemple ; qu’elles ne doivent pas s’exhaler toujours en des phrases concises et scrupuleusement exactes, mais s’échapper quelquefois à des manières de parler qui semblent hyperboliques et même fausses aux yeux du froid philosophe.

« La principale beauté, comme le grand défaut du dialogue d’Alferi, c’est que chaque mot est employé en conscience à pousser en avant l’action de la pièce par un argument suivi, une narration nécessaire, ou l’expression exacte et géométrique d’une émotion naturelle. Ici, point de digressions, point de conversations épisodiques, et jamais de maximes, si ce n’est d’une admirable brièveté. Ces qualités, poussées à l’extrême, donnent un certain air de solidité à toute la structure de Ia tragédie qui fatigue un lecteur ordinaire : le lecteur homme d’esprit prévoit