Page:Stendhal - Vies de Haydn, de Mozart et de Métastase, 1928, éd. Martineau.djvu/181

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lorsqu’il contait encore. Un lord, passionné pour la musique, à ce qu’il disait, vint le trouver un matin, et lui demanda des leçons de contre-point, à une guinée la leçon. Haydn, voyant que le milord avait quelques connaissances en musique, accepte. « Quand commençons-nous ? — Actuellement, si vous voulez, dit le lord » et il tire de sa poche un quatuor de Haydn. « Pour première leçon, reprend-il, examinons ce quatuor, et dites-moi le pourquoi de certaines modulations, et de la conduite générale de la composition, que je ne puis approuver totalement, parce qu’elles sont contraires aux principes. »

Haydn, un peu surpris, dit qu’il est prêt à répondre. Le lord commence, et dès les premières mesures il trouve à redire à chaque note. Haydn, qui inventait habituellement, et qui était le contraire d’un pédant, se trouvait fort embarrassé, et répondait toujours : «J’ai fait ceci, parce que ça fait un bon effet ; j’ai placé ce passage ainsi, parce qu’il fait bien. » L’Anglais, qui jugeait que ces réponses ne prouvaient rien, recommençait ses preuves, et lui démontrait par bonnes raisons que son quatuor ne valait rien. « Mais, Milord, arrangez ce quatuor à votre fantaisie ; faites-le jouer, et vous verrez laquelle des deux manières est la meilleure. — Mais pourquoi la vôtre,