Page:Sterne - Œuvres complètes, t5-6, 1803, Bastien.djvu/566

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L’ambition nous expliquera encore ses vertus.

À la première vue, il semble miraculeux qu’un homme aussi noir qu’Hérode ait pû se ménager la faveur et l’amitié d’un corps aussi sage et aussi pénétrant que le sénat de Rome, de qui il tenoit sa puissance. On croiroit que pour contrebalancer des vices si bas, et pour soutenir son caractère, Hérode possédoit quelque grand secret, intéressant à connoître. Il en possédoit un. Mais ce secret n’étoit autre chose que le déguisement de son ambition. Il étoit adroit, populaire, généreux et magnifique dans ses dépenses. Le monde étoit alors aussi corrompu qu’aujourd’hui, et Hérode le savoit, il connoissoit à quel prix il se vendoit, et quelles qualités il falloit montrer pour surprendre son approbation.

Il en jugeoit si bien que nonobstant la haine attachée à un si vil caractère, en dépit des impressions que laissoient les plaintes répétées de sa cruauté et de ses oppressions, il arrêtoit ce torrent en lui opposant le fantôme des vertus populaires. Lorsqu’il fut mandé à Rome pour y répondre sur les crimes qu’on lui imputoit, Joseph nous apprend que par le luxe de ses dépenses, et son ap-