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LE ROMAN DU PRINCE OTHON

moment on ne voyait en elle qu’une femme élancée et de belle figure olivâtre, laissant entrevoir un tempérament hardi ; puis, tout à coup, comme une fleur qui s’ouvre, elle s’animait de vie et de couleurs, de gaieté et de tendresse. Mme de Rosen tenait toujours une arme en réserve pour achever un admirateur mal assuré. Elle attaqua Othon avec un dard de tendre gaieté.

— Enfin, vous voilà donc venu à moi, prince cruel ! dit-elle. Papillon que vous êtes ! Eh bien, ne puis-je vous baiser la main ? ajouta-t-elle.

— C’est à moi, Madame, de baiser la vôtre. Et Othon, saluant, se courba pour lui déposer un baiser sur les doigts.

— Ah ! vous me refusez toutes les douceurs ! dit-elle en souriant.

— Quoi de nouveau à la cour ? demanda le prince. Je viens à vous pour ma gazette.

— Calme plat, répondit-elle. Le monde est endormi ; il grisonne en sommeillant. Je ne puis me rappeler un seul mouvement de réveil depuis toute une éternité : la dernière chose en fait d’émotion eut lieu la dernière fois que l’on permit à ma gouvernante de me donner une claque. Mais cependant je me fais une injustice, ainsi qu’à votre malheureux palais enchanté. Voici la dernière. Oh ! positivement la toute dernière ! — Et là-dessus, derrière l’éventail, avec maints sourires, maints effets d’habile racontage, elle lui détailla l’histoire en question.

Les assistants s’étaient retirés à l’écart, car il était reconnu que la comtesse de Rosen se trouvait en faveur. Celle-ci, néanmoins, de temps à autre