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sénat qu’il avait désiré, simple citoyen, que l’empereur en eût pour lui. Il reçut avec la plus vive reconnaissance le titre de Père de la Patrie, que lui offrit le sénat, et qu’il avait refusé une première fois.

Il perdit son épouse Faustine, la troisième année de son règne. Le sénat lui rendit les honneurs divins, et lui décerna des jeux dans le cirque, un temple, des prêtresses, et des statues d’or et d’argent. Lui-même consentit que l’image de cette impératrice fût portée dans tous les jeux du cirque, et il accepta la statue d’or que le sénat voulut lui ériger.

Sur la demande de cette assemblée, il créa consul M.Antonin, qui était questeur ; et il désigna pour la questure, avant l’âge, Annius Vérus, qui fut dans la suite appelé Antonin. Il ne statuait rien concernant les provinces, il ne prenait aucune mesure importante, avant d’en avoir conféré avec ses amis, et ses édits n’étaient que l’expression de leur opinion. Il les recevait vêtu comme un simple particulier, et occupé de ses affaires domestiques.

VII.

Il gouverna les peuples qui lui furent soumis avec un soin aussi vigilant que si eux et leurs biens lui eussent appartenu. Toutes les provinces furent florissantes sous son règne. Les délateurs disparurent. La confiscation des biens devint plus rare que jamais ; un seul citoyen, Attilius Tatien, coupable d’avoir aspiré à la tyrannie, vit mettre ses biens en vente, et ce fut le sénat qui lui infligea cette peine. L’empereur ne voulut pas qu’on recherchât ses complices, et il aida son fils dans toutes les occasions. Convaincu du même crime, Priscien périt, mais par une mort volontaire ; et Antonin fit défense d’approfondir cette conjuration.

Antonin le Pieux mit dans sa manière de vivre une opulence sans faste et une économie sans avarice. Ses propres esclaves, ses oiseleurs, ses pêcheurs, ses chasseurs, pourvoyaient seuls aux besoins de sa table. Il ouvrait gratuitement ses bains au peuple, quand il s’était baigné. Il ne changea rien aux habitudes de sa vie privée. Il supprima les honoraires de plusieurs citoyens, qui les recevaient sans les gagner ; et il disait « qu’il n’y avait rien de plus contraire à la justice et même à l’humanité, que de laisser la république en proie à des oisifs qui ne lui rendaient aucun service. » C’est aussi ce qui lui fit diminuer la pension du poète lyrique Mésomède. Il connaissait exactement les revenus et les impôts des provinces. Il assura à sa fille le bien qu’il possédait en propre, mais il en donna les revenus à la république. Il vendit ceux des meubles et des biens de la couronne qui lui parurent superflus, et il vécut dans chacune de ses propres terres alternativement et selon les saisons. Il n’entreprit de voyages que pour visiter les possessions qu’il avait dans la Campanie, disant « Que le train d’un prince, même économe, est toujours à charge aux provinces » ; et quoiqu’il se tînt à Rome, afin de recevoir plus tôt les nouvelles qui y affluaient comme au centre de l’empire, il n’en eut pas moins une grande autorité sur toutes les nations.

VIII.

Il donna le congiaire au peuple et y ajouta le donatif aux soldats. Il consacra, en mémoire de Faustine, un fonds spécial à l’entretien de jeunes filles qui furent appelées Faustiniennes.

Les ouvrages que lui doit Rome sont le temple d’Adrien, dédié à ce prince ; le Grécostade, rebâti après un incendie ;