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Page:Suarès - Sur la mort de mon frère.djvu/127

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j’ai été son camarade ; je l’ai connu, je l’ai vénéré. Il était doux avec les faibles ; patient avec les petits, et trop ferme avec les grands : il ne leur cédait rien.

Lui. — Vous l’avez bien connu. Il n’a eu d’ennemis que deux ou trois lâches, quelques valets de ministre, l’espèce des envieux sans âme. Sans doute, plusieurs valets de ministre ensemble, armés de toutes les intrigues et de la signature, peuvent bien faire échec à un seul homme fort. Mais qu’importe ? La vraie grandeur est hors d’atteinte. Jean, sans avoir le succès, aurait eu la gloire sérieuse de s’accomplir.

Moi. — Oui. Avec peu de bonheur, il avait le génie de la vie.

Lui. — Il n’est pas question de bonheur : où serait-il ? Il s’agit de la force qu’on met à vivre, des actes que l’on y