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Page:Sue - Arthur, T1, 1845.djvu/122

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ville voisine, qui tenait garnison, trois excellents musiciens allemands, qui, placés dans ce pavillon, exécutaient à ravir de charmants trios d’alto, de flûte et de harpe.

Afin d’être seuls dans cette gondole et de ne pas ressentir la secousse des rames, je la faisais remorquer au bout d’une longue corde par un bateau conduit par deux de mes gens. Que de fois, ainsi bercés sur l’onde, plongés dans une molle et délicieuse rêverie, au bruit léger de l’urne frémissante, aspirant le doux parfum du thé, ou rafraîchissant nos lèvres dans la neige des sorbets, nous écoutions avec ravissement ces bouffées d’harmonie lointaine qui nous venaient de l’ile… pendant que la lune inondait de clarté les grands prés et les grands bois du parc !

Que de longues soirées j’ai ainsi passées à côté d’Hélène ! avec quelle sympathie nous nous sentions enivrés de ces brises de mélodie qui tantôt chantaient si suaves et si sonores, et tantôt se taisaient soudainement !… Je me souviens que ces brusques silences nous causaient surtout une tristesse à la fois douce et grande. L’oreille se blase, à la fin, de sons, tels harmonieux qu’ils soient, mais un chant ainsi coupé çà et là d’intermittences qui permettent