Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 7-8.djvu/159

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d’office de madame de Saint-Dizier, était un superbe crucifix en angélique avec sa couronne d’épine-vinette candie[1].

Ce sont là d’étranges profanations dont s’indignent avec raison même les gens peu dévots. Mais depuis l’impudente jonglerie de la tunique de Trèves jusqu’à la plaisanterie effrontée de la châsse d’Argenteuil, les gens pieux à la façon de la princesse de Saint-Dizier semblent prendre à tâche de ridiculiser, à force de zèle, des traditions respectables.

Après avoir jeté un coup d’œil des plus satisfaits sur la collation ainsi préparée, madame de Saint-Dizier dit à madame Grivois, en lui montrant le fauteuil doré qui semblait destiné au président de cette réunion :

— A-t-on mis ma chancelière sous la table,

  1. Une personne parfaitement digne de foi nous a affirmé avoir assisté à un dîner d’apparat chez un prélat fort éminent, et avoir vu au dessert une pareille exhibition, ce qui fit dire par cette personne au prélat en question. « Je croyais, monseigneur, que l’on mangeait le corps du Sauveur sous les deux espèces, mais non pas en angélique. » Il faut reconnaître que l’invention de cette sucrerie apostolique n’était pas du fait du prélat, mais était due au catholicisme un peu exagéré d’une pieuse dame qui avait une grande autorité dans la maison de Monseigneur.