Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 7-8.djvu/251

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Le soleil venait de se coucher ; le salon de cent couverts, où se donnait le festin, était profond, les fenêtres rares, étroites et à demi voilées de rideaux de cotonnade rouge ; et quoiqu’il ne fît pas encore nuit, la partie la plus reculée de cette vaste salle était presque plongée dans l’obscurité ; deux garçons apportèrent le punch monstre, au moyen d’une barre de fer passée dans l’anse d’une immense bassine de cuivre, brillante comme de l’or et couronnée de flammes aux couleurs changeantes. Le brûlant breuvage fut placé sur la table, à la grande joie des convives, qui commençaient à oublier leurs alarmes passées.

— Maintenant, dit Couche-tout-Nu à Morok d’un ton de défi, en attendant que le punch ait brûlé… en avant notre duel ; la galerie jugera.

Puis montrant à son adversaire les deux bouteilles d’eau-de-vie apportées par le garçon, Jacques ajouta :

— Choisis les armes.

— Choisis toi-même, répondit Morok.

— Eh bien !… voilà ta fiole… et ton verre… Nini-Moulin jugera les coups.

— Je ne refuse pas d’être juge du champ clos, répondit l’écrivain religieux ; seulement je dois vous prévenir que vous jouez gros jeu, mon camarade… et que, dans ce temps-ci…