Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 7-8.djvu/50

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— À moi… pitié !… s’écria Adrienne d’un air de fierté révoltée.

Puis se contenant, elle ajouta froidement :

— Ah çà… M. de Montbron, c’est une plaisanterie ?… Ce n’est pas sérieusement que vous me demandez de m’intéresser aux tourments amoureux de votre prince ?

Il y eut un dédain si glacial dans ces derniers mots d’Adrienne, ses traits pâles et péniblement contractés trahirent une hauteur si amère, que M. de Montbron dit tristement :

— Ainsi… cela est vrai… on ne m’avait pas trompé… Moi qui, par ma vieille et constante amitié, avais, je crois, quelques droits à votre confiance, je n’ai rien su… tandis que vous avez tout dit à un autre… Cela m’est pénible… très-pénible.

— Je ne vous comprends pas, M. de Montbron.

— Eh ! mon Dieu !… maintenant je n’ai plus de ménagements à garder…, s’écria le comte. Il n’y a plus, je le vois, aucun espoir pour ce malheureux enfant ;… vous aimez quelqu’un.

Et comme Adrienne fit un mouvement :

— Oh ! il n’y a pas à le nier, reprit le comte, votre pâleur… votre tristesse depuis quelques jours… votre implacable indifférence pour le