Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/344

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grands yeux bleus, devenus caves, commençant à se retirer au fond de leurs orbites, paraissaient énormes ; leurs lèvres, naguère si vermeilles, se couvraient déjà d’une teinte violette… comme celle qui remplaçait peu à peu la transparence carminée de leurs joues et de leurs doigts effilés… On eût dit que tout ce qu’il y avait de rose et de pourpre dans leur ravissant visage se ternissait ainsi peu à peu sous le souffle bleuâtre et glacé de la mort…

Lorsque les orphelines se trouvèrent face à face, défaillantes, se soutenant à peine… un cri de mutuel effroi sortit de leur sein ; chacune, à la vue de l’épouvantable altération des traits de sa sœur, s’écria :

— Ma sœur… toi aussi, tu souffres ?…

Et toutes deux se précipitèrent dans les bras l’une de l’autre en fondant en larmes ; puis, s’interrogeant du regard :

— Mon Dieu, Rose… tu es bien pâle !

— Comme toi, ma sœur…

— Tu ressens aussi un frisson glacé ?…

— Oui, je suis brisée ;… ma vue se trouble…

— Moi, j’ai la poitrine en feu…

— Ma sœur, nous allons peut-être mourir ?…

— Pourvu que ce soit ensemble…

— Et notre pauvre père ?…

— Et Dagobert ?…