Page:Sue - Les misères des enfants trouvés II (1850).djvu/125

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D’un bond je sautai à bas de la chaise où j’étais monté, j’allais dire à Basquine ce que je venais d’observer au dehors, lorsque tout à coup un morceau du plancher du vestiaire où nous étions, se détacha presque sous nos pieds, comme s’il eût été scié à l’avance, et maintenu jusqu’alors par un support extérieur ; puis, par cette ouverture de dix-huit pouces carrés, nous vîmes soudain sortir la tête et les épaules de Bamboche.

— Vite… — nous dit-il, — venez…

Et il disparut pour nous faire place.

— Passe la première, — dis-je à Basquine.

En une minute elle eut disparu par cette espèce de trappe.

Au moment où je suivais Basquine, la porte s’ébranlait violemment sous les efforts de la Levrasse, et presque instantanément j’entendis la voix de la mère Major crier avec épouvante.

— Au feu !… au feu !…

Lorsque, après avoir marché courbé au milieu de plusieurs bottes de paille destinées à la litière de Lucifer, je sortis de dessous la voiture presque en même temps que Basquine… je fus ébloui par une grande flamme qui brillait à ma gauche, et éclairait au loin la campagne.

Devant moi je vis Bamboche tenant à la main une grosse torche de paille allumée.

Me prendre par le bras de la main qu’il avait libre, m’écarter violemment et lancer son brandon enflammé au milieu de la litière étalée sous la voiture que nous venions de quitter, ce fut pour Bamboche l’affaire d’une seconde.

Le feu qu’avivait encore le courant d’air par le trou qui nous avait donné passage, se propageant avec une effrayante rapidité, bientôt la voiture fut intérieurement et extérieurement livrée aux flammes, car Bamboche avait déjà amoncelé plusieurs bottes de paille le long de la portière, seule issue qui restât aux gens enfermés dans la voiture.

— Le feu… — m’écriai-je lorsque je pus parler, car tout cela s’était passé avec la rapidité de l’éclair.

— Oui… le feu.