Page:Sue - Les misères des enfants trouvés II (1850).djvu/251

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Loin de borner l’éducation de ses élèves à la lecture, il leur donnait, autant que possible, une instruction utile et pratique pour leur condition.

Ainsi ses enseignements, clairs, simples, variés, touchaient et résolvaient toutes les questions fondamentales de l’agriculture, appropriées à la culture de la contrée qu’il habitait, sauvegardant ainsi toute une jeune génération contre les préjugés et la routine.

De plus, deux fois par semaine, Claude Gérard conduisait ses écoliers chez un petit nombre d’artisans établis dans la commune ; là, chacun, selon son goût, apprenait du moins les premiers rudiments d’un de ces états manuels, pour ainsi dire indispensables au cultivateur isolé dans sa ferme, à de grandes distances des villages ; ainsi la plupart des écoliers de Claude Gérard, devenant un peu charpentiers, serruriers et maçons, pouvaient au besoin étayer une charpente affaissée, ferrer une charrue ou consolider un mur crevassé ; afin d’obtenir des artisans ces leçons pratiques pour ses écoliers, qui d’ailleurs leur servaient ainsi d’apprentis deux fois par semaine et les aidaient dans leurs travaux, Claude Gérard donnait à ces artistes eux-mêmes certaines notions de géométrie et de mécanique élémentaires, applicables à leur profession, et très-nécessaires au charpentier pour la coupe et l’assemblage des bois, au maçon pour la taille des pierres et la bâtisse, au serrurier pour le calcul des ressorts, des poids et des leviers.

Les dimanches on herborisait et l’on apprenait à connaître et à employer une foule de plantes rustiques douées de vertus salutaires ; le jeudi, Claude Gérard enseignait le chant par une méthode admirable de simplicité, de clarté, dans laquelle les signes si horriblement indéchiffrables de l’écriture musicale étaient remplacés par des chiffres ordinaires, 1, 2, 3, 4, etc., etc., connus et lisibles par tous les enfants[1]. Claude Gérard écrivait lui-même ces simples et

  1. Nous aurons occasion de revenir sur cette merveilleuse découverte de Galin, qui a donné un si magnifique développement à une excellente idée de Rousseau, et a fait de la musique vocale une science toute nouvelle et à la portée de tous, science que M. L. D. Émile Chevé et M. Aimé Pâris, deux des plus fervents adeptes de Galin, ont vulgarisée avec autant d’éclat et de bonheur que de désintéressement, et qui obtiennent chaque jour des résultats presque incroyables.