Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 5-6.djvu/192

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— J’en réponds… c’est bête… mais honnête ; je connais les hommes.

Puis, me donnant le billet :

— Tiens bien cela dans ta main, à poing fermé, et tu rapporteras l’or en un rouleau ; dépêche-toi, car l’heure approche, et il faut que nous soyons au Louvre avant une heure.

J’allai changer le billet, je rapportai le rouleau d’or à Balthazar qui le rompit… compta les pièces, les fit un instant bruire, miroiter complaisamment dans sa main, puis il les remit à Robert, qui lui dit :

— Eh bien !… prends donc.

— Quoi ?

— Eh ! pardieu… ce que tu voudras… de ces cinquante louis.

— Merci… Robert.

— Ah ça, es-tu fou ? n’avons-nous pas là encore ?…

— Mon brave Robert, — dit le poète avec une fermeté douce, — tout sera commun entre nous… moins l’argent qui vient de cet homme-là…

— Quel caprice étrange !

— Arrière… arrière, — s’écria Balthazar, non plus gravement cette fois, et reprenant le cours de ses folles imaginations : — Est-ce que j’ai besoin de ton or ? Est-ce que demain ou après-demain, ou après… je n’en serai pas gorgé, repu, saturé d’or ?… Est-ce que mes scélérats de libraires ne vont pas m’envoyer le prix de mes œuvres dans des coffres de bois de sandal portés par des nègres ?…

Et comme midi sonnait à la petite pendule :