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CHAPITRE V.


les adieux.


Après avoir quitté Bamboche, reprit Basquine, — je m’éloignai de Paris de crainte de le rencontrer et de céder à de nouvelles instances ; je continuai de chanter dans les cafés des villes où je passais. Quoique mon public fût aussi grossier que notre ancien public, lorsque nous faisions partie de la troupe de la Levrasse, je tâchais de donner à ma voix, à mon accent, à ma physionomie, le plus d’expression possible ; tout devenait ainsi pour moi un sujet d’étude et d’observation sur les moyens de captiver, d’émouvoir les spectateurs. J’essayai même de composer les paroles et les airs de quelques chansonnettes qui furent assez goûtées de mon auditoire en plein vent. Préoccupée du seul but où tendaient toutes mes pensées, j’étais à peine sensible à la dure pauvreté, aux dégoûts, aux ignobles contacts que m’imposait mon nouveau vagabondage, misères qui auraient dû m’être d’autant plus pénibles, que durant mon long séjour chez le milord-duc, j’avais connu tous les raffinements d’une vie opulente ; le hasard m’ayant amené à Orléans, un