Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 5-6.djvu/321

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le pauvre agneau, que tu étais devenu curé… de rencontre.

La Levrasse grinçait les dents de rage ; mais, contenu par la frayeur que lui inspirait Bamboche, il se borna à lui montrer le poing en s’écriant :

— Ah ! grand gueux !… ah ! traître… c’est plus de cent mille francs que tu me fais perdre…

Puis il ajouta en frappant du pied avec fureur, et s’adressant à Robert de Mareuil :

— Y comprenez-vous quelque chose, Mareuil ? Quel intérêt peut-il avoir à tout perdre, ce brigand-là ? quand c’est lui qui a tout mené ? quand tout était fini et allait comme sur des roulettes ?

— Ah ! vous ne savez pas quel intérêt j’ai à vous démasquer, — reprit Bamboche, — j’ai un intérêt bien simple… vous allez le connaître.

S’adressant alors à Régina, toujours agenouillée, et qui se croyait sans doute sous l’obsession de quelque horrible vision :

— Excusez-moi, Mademoiselle, si je suis forcé de prolonger quelques instants encore cette scène si pénible pour vous, mais vous devez tout savoir. Vous souvenez-vous… il y a huit ou neuf ans de cela… d’avoir rencontré dans la forêt de Chantilly trois petits mendiants qui vous ont imploré ?

— Oui… je me rappelle… cela, — dit Régina, qui semblait rêver.

— Vous seule, — reprit Bamboche, — avez eu pour ces trois enfants… j’étais l’un d’eux… des paroles de douceur et de pitié. Pourtant, exaspérés par la dureté des personnes qui vous accompagnaient, ces enfants un