Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 5-6.djvu/333

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— Oui… c’est moi, — lui dis-je en tâchant de me débarrasser de lui : — Vous vouliez commettre une infamie… je l’ai empêchée.

— Ainsi… tu me trahissais… tu étais le complice de Bamboche et de Basquine… et tu m’as perdu… Fidèle Martin, — murmura-t-il entre ses dents serrées de fureur.

Puis déployant dans ce moment suprême une vigueur incroyable, il parvint à passer sa main entre mon cou et ma cravate, à saisir celle-ci, et à lui imprimer un mouvement de torsion si puissant, que je suffoquai… mes forces m’abandonnaient.

— Tu comprends, fidèle serviteur, — dit le comte avec un ricanement féroce en continuant de me maintenir à demi étranglé ; — tu comprends qu’un comte de Mareuil n’est pas du gibier de galère… Je me tuerai… mais avant, tu mourras…

Cette lutte, acharnée, désespérée, se passait dans une profonde obscurité ; mais à un mouvement que je sentis faire au comte, de sa main droite, pour fouiller dans sa poche, tandis que, de sa main gauche, il tordait violemment ma cravate, je me rappelai les pistolets de Bamboche que le comte avait saisis sur l’autel au moment de l’arrivée de la police ; soudain je sentis le froid du canon de l’une de ces armes appuyé sur ma tempe.

Un dernier effort de ma part fit dévier le coup, mais ne l’empêcha pas de partir… une flamme éblouissante me brûla la vue ; il me sembla qu’un fer rouge me traversait le cou, tandis qu’une commotion foudroyante me jeta à la renverse.