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jours heureux de pouvoir vous être agréable, mais, pour en revenir au capitaine Just, sa tristesse doit se trouver mal à l’aise au milieu de tous vos élégants.

— Lorsque M. Just Clément désire me voir, — répondit la princesse, — il m’écrit un mot le matin, et je le reçois d’assez bonne heure, pour qu’il n’ait aucune chance de rencontrer quelqu’un.

— Je vous approuve fort, le capitaine Just a droit à être particulièrement distingué, non seulement à cause de la triste position où il se trouve, mais encore par sa valeur, par son mérite personnel : et, quoique jeune encore, c’est un homme qui, je l’avoue, commande la considération.

Ces derniers mots furent prononcés par le prince avec un accent de loyauté, de sincérité, qui me toucha. Mme de Montbar parut ressentir la même impression, car, au lieu de continuer de parler à son mari d’un ton sec et froidement poli, sa voix se détendit, s’adoucit, et elle reprit :

— Je vous sais infiniment de gré d’apprécier avec une si généreuse impartialité un homme, qui n’est pas comme on dit de notre monde, et qui deviendra, je le crois, un de mes plus sûrs et de mes meilleurs amis…

Soit que le prince se reprochât le premier mouvement auquel il avait d’abord cédé en rendant justice au capitaine Just, soit que la réponse de la princesse lui eût causé quelque secret dépit, il reprit avec un sourire qui me parut ironique et forcé :

— Vous n’accorderez probablement au capitaine, ces entrées privilégiées que jusqu’à la fin de son deuil ?

— Pourquoi cela ? — demanda gravement Régina.