Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 5-6.djvu/52

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Lorsque je m’éveillai, il faisait jour, mais l’épaisseur des rideaux fermés laissait régner dans la chambre une demi-obscurité. J’entendis le ronflement d’un poêle dont le brasier se reflétait sur le carrelage rougeâtre ; je vis près de moi, sur une chaise, un morceau de pain et une tasse de lait. Surpris de ces prévenances de mon hôte, je regardai de côté et d’autre, j’étais seul…

Plus effrayé de cette solitude que de la présence du cul-de-jatte, je voulus m’habiller, et je cherchai mes misérables vêtements, mis presque en lambeaux lors de la rixe de la veille ; ils avaient disparu ; mais, à leur place, je vis sur le pied du lit un pantalon, un gilet, une redingote de drap, tout neufs, et une paire d’excellentes chaussures… Cet échange, quoique tout à mon avantage, me désespéra, car, dans la poche de ma veste, j’avais jusqu’alors soigneusement conservé le portefeuille enlevé à la tombe de la mère de Régina… mais bientôt, à ma grande joie, j’aperçus ce portefeuille ouvert, il est vrai, sur une table voisine de mon lit… je le saisis avec autant d’empressement que d’inquiétude… Heureusement je retrouvai tout ce qu’il contenait, je savais le nombre des lettres. Elles y étaient toutes, ainsi que la croix et le feuillet de parchemin où se voyait tracée une couronne royale entourée de signes symboliques.

Mais bientôt j’eus une crainte. Ce portefeuille enlevé par moi, et pour ainsi dire des mains du cul-de-jatte, huit années auparavant, alors que je l’avais frappé au moment où il venait de violer la tombe de la mère de Régina, ce portefeuille avait-il été reconnu par le ban-