Page:Sue - Martin l'enfant trouvé.djvu/264

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

M. le comte est notre candidat… nous ne voulons que lui… M. de la Levrasse ne nous va plus… Comment alors n’avez-vous pas tout de suite répondu oui, à M. le vicomte ?… Permettez-moi de vous le dire, c’est inexcusable.

— C’est vrai, mon ami, j’ai eu tort, — répondit modestement Madame Chalumeau.

Le comte Duriveau vit, à l’expression railleuse des traits de Scipion, que celui-ci allait relever la belle sentence de M. Chalumeau. Aussi voulant couper court à un persiflage qui pouvait lui aliéner un de ses principaux électeurs, et voyant heureusement le dîner tirer à sa fin, le comte s’écria :

— Messieurs, puisque nous parlons des élections, sujet si grave pour des hommes sérieux, pour des hommes politiques comme nous le sommes, permettez-moi de porter un toast qui sera, je l’espère, bien accueilli de vous.

Puis, se retournant à demi vers Martin qui, debout derrière son maître qu’il servait, assistait impassible à cette scène, le comte lui dit en tendant son verre :

— Donnez-moi du vin de Chypre.

Martin prit sur une étagère une carafe de cristal, et versa au comte un verre de ce nectar, couleur de topaze liquide.

— Messieurs, — dit alors le comte en se levant, aux propriétaires !… les seuls vrais soutiens, les seuls vrais garants de l’ordre et de la paix, les seuls, les vrais représentants de notre belle France, puisqu’ils nomment ses législateurs.