Page:Sue - Martin l'enfant trouvé.djvu/319

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vices, parce qu’elle m’a jugé seul digne de les idolâtrer ! — dit Scipion avec un détestable orgueil.

— Le malheureux est perdu…, cette horrible créature l’a pris par la vanité du vice, — murmura le comte épouvanté.

— Oui, ce que j’idolâtre en elle, — poursuivit Scipion avec une exaltation croissante, — c’est le contraste de cette âme noire comme l’enfer avec cette figure angélique couronnée de cheveux blonds ; aussi, j’ai défendu ce soir Basquine contre tes accusations, afin qu’elle conserve toujours cette auréole de vertu qui nous réjouit tant, et qui éblouit si fort les naïfs et les prudes… Comprends-tu maintenant mon idolâtrie pour ce démon ? mais hélas !… j’idolâtre platoniquement,… car elle a remis l’heure du berger… l’heure du diable, a-t-elle dit, après mon mariage avec Raphaële, mariage dont elle, Basquine, veut seule avec toi régler les conditions… Ainsi, prends garde, — ajouta Scipion avec un accent de menace inexorable, — satisfais Basquine… mon mariage, et par conséquent le tien, sont à ce prix… sinon, non.

Le comte croyait assez connaître les antécédents de Basquine, pour voir dans la passion dépravée qu’elle avait su inspirer à son fils, un abîme où pouvaient non-seulement s’engloutir ses plus chères espérances, à lui, Duriveau, mais encore l’avenir, l’honneur, peut-être la vie de Scipion. Tout-à-coup, se frappant le front, comme si un souvenir soudain lui venait à l’esprit, le comte tira de sa poche le signalement de Bamboche que l’un de ses convives lui avait remis ; sur ce signalement on lisait, on le sait, que le prisonnier fugitif avait, entr’autres