Page:Sue - Martin l'enfant trouvé.djvu/342

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— C’est égal, la mère, petit peu et petit peu, ça finit par faire pas mal ; et ces jours-là, pendant que je buvais quelques verres de vin et que je me régalais d’un morceau de viande, toi, la mère, tu buvais, comme toujours, de la mauvaise eau du puits, et tu mangeais du caillé avec ton pain noir… mais le malheur vous apprend… oh ! oui… ça vous apprend… et…

— Écoute, — dit tout-à-coup la métayère en interrompant son mari, et prêtant l’oreille avec attention.

Les deux vieillards restèrent muets et écoutèrent.

Alors, au milieu du profond silence de la nuit on entendit retentir à deux reprises différentes le cri de l’aigle de Sologne.

— C’est Bête-puante, — dit tout-à-coup la métayère, — c’est son signal… Il veut peut-être me parler de cette pauvre chère dame Perrine. Pourvu que sa folie, qui lui a repris le jour de la mort de cette pauvre petite Bruyère, ait cessé… Bête-puante le sait peut-être, car toujours il s’inquiétait de dame Perrine…

Le cri qui servait de signal à Bête-puante ayant de nouveau retenti, la métayère prit une lanterne et sortit précipitamment, gagna l’étroite jetée qui bordait l’étang près des ruines du vieux fournil ; par trois fois la mère Chervin éleva sa lanterne en l’air, puis l’éteignit et attendit.