Page:Sue - Martin l'enfant trouvé.djvu/36

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

vert de touffes de fougères et de genêts formant le dôme, et à travers lesquelles le braconnier qui reste ainsi des heures immobile et guettant sa proie, peut l’apercevoir et tirer le gibier presque à bout portant.

À la vue de Bête-Puante, Bamboche, malgré son audace, recula d’un pas frappé de stupeur ; les pierres qu’il avait ramassées pour se défendre, tombèrent de ses mains, soit qu’à l’aspect d’une courte carabine à deux coups dont le braconnier était armé, le fugitif comprît que la lutte était trop inégale, soit enfin qu’un pressentiment lui dît qu’il devait exister quelque affinité sympathique entre sa condition de fugitif et la vie aventureuse qu’il rencontrait de l’homme des bois.

Toutefois, se reculant encore, il continua de jeter sur le braconnier un regard de farouche inquiétude.

— Tu t’appelles Bamboche, tu es évadé des prisons de Bourges… traqué comme une bête fauve, tu ne pourrais échapper… je viens à ton aide… au nom de… Martin.

À ce nom de Martin la farouche physionomie de Bamboche se transfigura ; une touchante émotion détendit ses traits jusqu’alors durs et contractés ; une larme voila le sauvage éclat de son regard : les mains jointes, les lèvres entr’ouvertes, le cœur palpitant, la poitrine bondissante, il ne put que s’écrier d’une voix étouffée par l’attendrissement :

— Martin !!

Mais voyant le doute se peindre sur les traits du fugitif, après cette explosion d’affectueux ressentiments, le braconnier se hâta d’ajouter :