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bois et les dents de Félix, de m’asseoir sur le lit de ma tante et de me laisser embrasser par elle.

Mademoiselle de Maran prenait du tabac en profusion, et l’odeur du tabac m’était insupportable. Pourtant, malgré la peur et la répugnance que m’inspirait ma tante, je me sentais touchée des marques d’affection qu’elle voulait me donner. Je faisais des efforts inouïs pour surmonter mon effroi, et souvent je ne pouvais y parvenir.

J’ai su plus tard (et la conduite de mademoiselle de Maran ne m’a que trop prouvé son aversion) que ce n’était pas par tendresse, mais pour s’amuser de ma frayeur qu’elle me faisait subir son baiser de chaque matin.

Une scène entre autres m’a laissé un souvenir ineffaçable. Elle fera juger du caractère de ma tante.

Un jour on m’amena auprès d’elle.

Était-ce pressentiment, hasard ? Jamais elle ne m’avait paru plus méchante… Je n’osais en approcher. Je baissais tellement la tête, que les longues boucles de mes cheveux me tombaient sur le visage.