Page:Sue - Paula Monti, tome 2, 1845.djvu/78

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mon vœu le plus ardent serait de vous voir dans une position telle que mon dévouement pour vous fût votre suprême bonheur, votre seule joie, votre seule consolation ; je dis que j’aimerais autant vous voir morte qu’indifférente à ce que je ressens pour vous… que j’aime comme ma mère, comme ma sœur, comme mon Dieu ; je dis que ceux que vous avez aimés, c’est-à-dire Raphaël et Morville, n’ont pas fait pour vous la millième partie de ce que j’ai fait moi-même, et ils ont occupé, et ils occupent votre vie, votre pensée tout entière, tandis que moi je ne suis rien pour vous… Cela est injuste, marraine… bien injuste.

— Osez-vous parler ainsi, vous que j’ai recueillie, comblée de mes dons… Et qu’avez-vous donc fait pour reconnaître mes bontés ?

— Vous me demandez ce que j’ai fait, marraine ! Eh bien ! je vais vous le dire à cette heure… car il faut que notre destinée s’accomplisse. Ce que j’ai fait ? J’ai fait tuer Raphaël par M. Charles de Brévannes, d’abord…

— Toi… toi… Mon Dieu ! elle m’épouvante.

— Oui, moi… Vous ne saviez pas ce que c’était que Raphaël… Vingt fois, en voyant vos larmes, vos regrets, j’ai été sur le point de vous dire : Vous n’avez rien à regretter… Raphaël était indigne de vous… Mais je ne voulais pas parler… je vous dirai tout à l’heure pourquoi.

— Malheureuse ! explique-toi… que veux-tu dire ? Tout ceci n’est-il qu’une sanglante raillerie ?