Page:Sue - Plik et Plok, 1831.djvu/240

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Un officier laissait-il négligemment errer sa bourse, le jeune Kernok la ramassait avec soin ; mais ses camarades avaient part au contenu. Volait-il du rhum au capitaine, il partageait encore scrupuleusement avec ses intimes.

Et quelle âme ! Combien de fois, lorsque les nègres que l’on transportait d’Afrique aux Antilles, engourdis par le froid humide et pénétrant de la cale, ne pouvaient se traîner jusque sur le pont pour humer l’air, pendant le quart-d’heure qu’on leur accordait à cet effet, combien de fois, dis-je, le jeune Kernok ne rappela-t-il pas la moiteur et la transpiration sur leur peau glacée, en hâtant leur marche à coups de corde ! Et M. Durand, canonnier-chirurgien-charpentier du brick, remarquait judicieusement qu’aucun des congos soumis à la surveillance de Kernok n’était atteint de cette somnolence, de cette torpeur qui affectait les autres nègres. Au contraire, les siens, à la vue du menaçant bout de corde, étaient toujours dans un état d’agitation, d’irritabilité nerveuse, comme disait M. Durand, d’irritabilité nerveuse fort salutaire.

Aussi Kernok obtint-il bientôt l’estime et la confiance du capitaine négrier, capable heureu-