Page:Sully Prudhomme - Œuvres, Poésies 1878-1879, 1886.djvu/54

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montre que tous les corps tombent également vite dans le vide, car cette égalité de vitesse s’explique très bien en admettant que la pesanteur agit par des sollicitations égales et indépendantes.

En chimie, d’autre part, on découvrit que, dans toutes les combinaisons et décompositions des corps, la manifestation physique de leur poids reste constamment la même et qu’ainsi le jeu des affinités laisse aux actions de la pesanteur toute leur indépendance. Quelques modifications chimiques que puissent subir les corps, leur poids ne perd ni ne gagne. Mais la réciproque n’est pas vraie : on reconnut que l’affinité varie avec les poids ; que les modifications chimiques sont subordonnées à des modifications constantes de poids, c’est-à-dire que les corps ne se combinent entre eux qu’en proportions pondérables définies. On constata ainsi entre l’affinité et la pesanteur une relation telle que les propriétés chimiques d’un corps dépendent de sa composition centésimale. En conséquence, on admet que l’élément ou atome chimique est constitué, dans les corps simples, par une molécule matérielle d’un poids élémentaire, et, dans les corps composés, par une molécule matérielle formée des molécules agrégées de plusieurs corps simples dont les poids élémentaires sont soumis entre eux à des rapports fixes et s’ajoutent nécessairement pour faire le poids de la molécule composée. Ce sont encore, dans la pensée du savant moderne, de petites masses pesantes qui représentent le substratum des phénomènes physiques et chimiques. Cette conception, mieux fondée que la théorie antique, parce qu’elle s’appuie sur l’expérience, n’est pas moins viciée par une métaphysique grossière. Le savant, il est vrai, se défend de toute prétention métaphysique, mais on ne peut