l’existence du Dieu purement métaphysique. Aussi la foi chrétienne est-elle un organe de connaissance, non pas seulement supérieur à la raison, mais, en outre, dominateur de la raison : celle-ci doit y sacrifier ses répugnances, et la foi lui rend le sacrifice facile et doux. On devait donc s’attendre à ce qu’il mît humblement, mais résolument, son génie au service du dogme comme un esclave herculéen accompagnant son maître pour lui frayer passage et inviter la foule à le saluer. Si des indifférents, des défiants, ignorent ou contestent les qualités et les titres du maître, l’esclave les proclame. Il les proclame bravement, car il y croit, il marche en avant et ne ment pas. Ainsi le génie sert le dogme avec une entière confiance et une parfaite loyauté, et le reconnaît son supérieur en le servant. Peut-être ces deux alliés d’inégale condition fussent-ils toujours demeurés étrangers l’un à l’autre si les attaques de l’impiété ne les eussent rapprochés. Quoi qu’il en soit, l’esprit tout ensemble le plus lucide et le plus droit, le plus rigoureux et le plus souple, est mis en demeure et se fait gloire de soutenir un dogme religieux dont une longue accoutumance nous empêche seule de sentir toute l’étrangeté.
Nous allons assister à un phénomène moral des plus
curieux, mais tout autre qu’il n’apparaît à ceux qui voient
dans Pascal un sceptique aux prises avec la foi. Il ne se
passe aucun drame dans son cœur pour le salut de sa
croyance, encore moins pour la conquête d’une certitude.
Il est assuré d’avance du triomphe de sa foi, car, si sa raison,
livrée à elle-même, ne la peut pas servir par une
complète adhésion, il n’en sera pas du tout surpris. Il s’y
attend et y trouvera une occasion de s’humilier qu’il
accueillera sans la moindre amertume ; il n’apporte aucune
présomption dans son entreprise. Il n’est pas bien fixé sur