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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

trouveront aux environs de proche en proche, lesquelles en ce cas il faudrait de nouveau partager et en donner à chacune bourgade ou paroisse, selon le nombre de familles dont elle serait composée, il tâchera de persuader cette vérité par toutes sortes de moyens au dit sieur évêque, au gouverneur et aux principaux du pays, afin qu’ils concourrent unanimement à faire réussir ce dessein, lequel il leur fera connaître être non seulement d’une nécessité absolue pour leur conservation, mais même que Sa Majesté le fera exécuter par une révocation générale de toutes les concessions.

« Au cas que quelques-uns de ceux auxquels les dites concessions ont été faites se mettent en devoir de les défricher entièrement, et qu’avant l’expiration des six mois portés par le dit arrêt, ils aient commencé d’en défricher une bonne partie, l’intention de Sa Majesté est que sur leur requête le conseil souverain les puisse pourvoir d’un nouveau droit de six mois seulement, lequel étant fini, elle veut que toutes les susdites concessions soient déclarées nulles.

« Il apportera, s’il se peut, un rôle de tous les habitans, tant hommes, femmes, garçons, filles que petits enfans[1].

« Il s’informera soigneusement de toute l’étendue du pays qui est occupé par les Français, de chacune habitation particulière, du nombre de familles et de personnes dont elles sont composées, et des lieux de leur situation, dont il faudra dresser une forme de carte autant exacte qu’il se pourra.

« Il fera mention du nombre d’arpens de terre qui seront labourés et enclavés en chacune habitation, et de quelle qualité sont celles non défrichées, qui se trouvent entre les dites habitations.

« Il s’informera aussi de la quantité de blé que le pays peut produire, année commune ; s’il en produit plus grande quantité qu’il n’en faut pour la subsistance des habitans, et s’il y a quelque sorte d’espérance que cela pourra augmenter ou non, étant d’une extrême conséquence pour les peuples du dit pays de cultiver la terre, en sorte qu’elle fournisse plus de blé qu’il n’en est nécessaire pour leur nourriture, afin de n’être pas exposés à l’avenir à la même peine où ils ont été jusqu’à présent, de ne pouvoir nourrir[2] les personnes qui y passent chaque année, si en même temps l’on n’y porte des farines pour leur subsistance.

« Le dit sieur Gaudais observera s’il manque au dit pays des femmes ou des filles, afin d’y en envoyer le nombre nécessaire l’année prochaine.

« Le principal préjudice que les habitans du pays reçoivent venant des Iroquois, lesquels à tous moments attaquent les Français à dépourvu et les massacrent cruellement, sans qu’il y ait d’autres moyens de remédier à leurs surprises qu’en les allant attaquer dans leurs foyers et les exterminer chez eux, le roi a résolu, en cas qu’on l’estime nécessaire, d’envoyer l’année

  1. Nous donnons ailleurs les recensements nominaux de 1665 et 1666. Comme M. Gaudais ne resta que six semaines dans le pays, il est peu probable qu’il ait fait un relevé de la population ; en tous cas, rien de tel n’a été découvert par les historiens.
  2. Il faut entendre ce passage dans le sens que voici : les habitants récoltaient assez de blé pour leurs besoins ; mais, faute de débouché au dehors, ils n’en cultivaient que pour la consommation sur place.