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CHAPITRE XXX.


Exemple du Dévoluy.

Je crains que toutes ces vérités, étayées de faits épars, n’aient pas encore le degré d’évidence que je désire leur donner. Je vais les représenter de nouveau, mais concentrées dans l’enceinte d’une seule localité. Je voudrais que des citations multipliées frappassent l’esprit, comme l’aspect réel des lieux frappe les sens, et imprime la conviction au fond des yeux.

Le Dévoluy forme à l’ouest du département une vallée allongée, divisée en deux parties par un petit col, et circonscrite par des chaînes élevées. On y pénètre par cinq passages, qui sont des gorges ou des cols que les tourmentes rendent impraticables pendant une partie de l’hiver. — Les montagnes sont chauves, dévorées par les troupeaux et par le soleil, sans ombre et sans verdure. Les fonds, presque déserts, sont ruinés par les déjections des ravins. L’aspect de ce misérable pays serre l’âme : on le dirait frappé de mort. La couleur pâle et uniforme du sol, le silence qui pèse sur ces campagnes, le spectacle hideux de ces montagnes, écorchées par les eaux et tombant en décomposition, tout annonce une terre décrépite, misérablement ruinée, et qui ne semble même pas lutter contre sa destruction. L’immobile sérénité du ciel, qui serait partout ailleurs un trait de beauté, ajoute encore ici à la tristesse morne du pays.

Je vais suivre pas à pas les fautes qui l’ont amené à cet état. On